21 nov. 2008

Extrait du rapport du Commissaire aux droits de l’homme relatifs à la zone

Extrait du rapport du Commissaire aux droits de l’homme relatifs à la zone
d’attente

Sur le recours suspensif pour les demandeurs d’asile

121. Enfin, la loi du 20 novembre 2007 a introduit un recours suspensif
pour la procédure de demande d'asile à la frontière, suite à l'arrêt de la
Cour européenne des droits de l'homme du 26 avril 200766. Tout en saluant
la célérité avec laquelle la décision a été prise en compte en droit
interne, le Commissaire a pu entendre certaines réserves quant aux
modifications apportées. Ainsi, la CNCDH indique entre autres que le
nouveau texte de loi "introduit un recours suspensif pour la seule
procédure de demande d'asile à la frontière, limitant ainsi la réforme à
la procédure concernée par le cas d'espèce pour lequel la France a été
condamnée par la Cour. Or, il y a d'autres procédures dans le domaine du
droit d'asile ou du droit des étrangers dans lequel un recours suspensif
n'est pas prévu"67. De plus, l’effectivité du recours est remise en cause
par nombre d’observateurs68 en raison notamment du délai extrêmement bref
– 48 heures – pour formuler l’appel. Ce délai court est également
applicable pendant les week-ends ou les jours fériés et il n’est pas rare
que des décisions de rejet soient notifiées le vendredi soir voire le
samedi ou le dimanche. L’aide juridique en zone d’attente est généralement
fournie par des militants associatifs qui ne sont pas présents dans
l’ensemble des zones et ne peuvent offrir un service continu en raison du
caractère non rétribué de leur engagement. Enfin, il n’est mis à la
disposition des demandeurs d’asile, pour leur permettre de formuler leur
appel, aucun moyen de communication avec l’extérieur en dehors de ceux
offerts par les associations.

Recommandations
17. Le Commissaire invite les autorités à analyser, en concertation avec
les institutions nationales indépendantes, les barrières juridiques et
pratiques pouvant limiter l’accès effectif à un recours contre une
décision de rejet de demande d’asile à la frontière ainsi qu’à revoir au
plus vite les mécanismes et délais liés à la procédure d’asile en
rétention.

Réponse du gouvernement

§ 121 et 122 relatifs aux modalités du recours en annulation contre les
décisions de refus d’entrée en France, au titre de l’asile :
Tirant les conséquences de l’arrêt de la Cour européenne des droits de
l’homme, GEBREMEDHIN c/France du 26 avril 2007, la loi du 20 novembre 2007
a institué un recours en annulation pleinement suspensif contre les
décisions de refus d’asile à la frontière. Cette mise en oeuvre dans des
délais rapides d’une décision de la Cour, saluée par le Président de la
Cour, souligne la volonté des autorités françaises de se conformer aux
engagements internationaux de notre pays. Ce dispositif apporte aux
demandeurs d’asile une garantie nouvelle très notable, qui était
recommandée depuis plusieurs années par plusieurs comités internationaux
de protection des droits de l’homme.
La lecture de l’arrêt de la Cour démontre que le législateur a pleinement
satisfait aux exigences posées par cet arrêt et en a parfaitement respecté
la portée. En effet cet arrêt porte exclusivement sur le régime applicable
aux demandes d’asile à la frontière et sur les exigences découlant de
l’article 3 (interdisant les mauvais traitements) et de l’article 13 (sur
le droit au recours) de la Convention et ne concerne pas d’autres aspects
du droit des étrangers. On rappellera également que le droit français
prévoit déjà de manière générale, pour les étrangers faisant l’objet d’une
mesure d’éloignement pour séjour irrégulier, un recours en annulation,
également pleinement suspensif, devant le juge administratif.
L’effectivité de ce recours est assurée : le délai de 48 heures pour
former un recours, délai rendu nécessaire pour être compatible avec la
durée totale du maintien en zone d’attente (soit 30 jours, une des durées
les plus courtes de l’ensemble des Etats de l’Union européenne), est
raisonnable dans la mesure où ce recours n’est pas soumis à des formalités
particulières et peut être exercé très facilement. Précisément parce que
la loi a institué une procédure orale devant le juge, le recours écrit
peut être présenté de manière très sommaire, sans qu’à ce stade, la
présence d’un avocat soit nécessaire. Ce dernier pourra assister
l’étranger lors de l’audience, en étant alors le cas échéant désigné
d’office, et exposer l’ensemble des craintes alléguées. En zone d’attente,
toutes facilités sont offertes au demandeur d’asile pour qu’il puisse
exercer son recours et l’ANAFE, à laquelle est reconnu un rôle de conseil
juridique en vertu d’une convention signée avec l’Etat et qui bénéficie
d’un accès permanent, (y compris les week-ends et jours fériés) à tous les
lieux d’hébergement de la zone d’attente, est habilitée à aider l’étranger
à présenter son recours et peut à cet égard s’organiser comme elle le
souhaite.

Recommandation n°17 relative aux recours contre une décision de rejet de
demande d’asile à la frontière :
Le régime juridique applicable aux recours contre les décisions de refus
d’asile à la frontière est intégralement conforme à l’arrêt de la Cour
européenne des droits de l’homme Gebremedhin c/France du 27 avril 20007
dont il découle, et les droits et facilités reconnus en vertu ce texte,
comme en application de la réglementation applicable aux zones d’attente
telle qu’elle résulte du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du
droit d’asile garantissent l’effectivité de cette voie de recours. Le
Comité des Ministres du Conseil de l’Europe, chargé du suivi de
l’exécution des arrêts de la Cour et qui a été saisi par la CNCDH, devrait
examiner cette question.
Les mécanismes et les délais applicables à l’examen des demandes d’asile
présentées en rétention sont tributaires des limites de la durée de la
rétention et doivent se concilier avec la nécessité d’assurer
l’effectivité des décisions administratives et juridictionnelles. Les
autorités françaises restent cependant très attentives à assurer un examen
effectif de la demande d’asile entouré de toutes garanties.


Sur le maintien des enfants en zone d’attente

96. Malgré la recommandation du rapport de 2006, la présence d’enfants
accompagnant leurs parents en centre de rétention administrative s’est
accrue. Onze CRA ont été aménagés spécialement pour recevoir des familles.
En 2007, la CIMADE a comptabilisé 154 familles accueillies avec 242
enfants de tous âges. Il est à regretter que les centres de rétention
administrative et les zones d’attente à la frontière soient les seuls
lieux en France où des mineurs de moins de treize ans sont privés de
liberté.
Selon les statistiques collectées par la CIMADE, près de 80 % des enfants
retenus en 2007 avaient moins de 10 ans55 et des nourrissons de 15 mois
voire des nouveau-nés – 3 semaines – ont été placés en rétention avec
leurs parents. Si cette privation de liberté est en générale inférieure à
2 jours, dans 28 % des cas elle se prolonge pendant plus de 10 jours56. De
plus, le nombre de places réservées aux familles étant insuffisant, il
arrive que des familles soient retenues dans des CRA ordinaires, où les
enfants sont mélangés avec des adultes.

Recommandations
- Protection des droits de l’homme dans le contexte de l’immigration et de
l’asile 12. Le Commissaire recommande que les centres de rétention
administrative et les zones d’attente à la frontière ne soient pas des
lieux d’exception quant à la détention des mineurs de moins de treize ans
et invite les autorités à ne recourir à la rétention administrative de
familles que dans des cas d’extrême nécessité.

Réponse de la France

Enfin, s’agissant des mineurs placés en zone d’attente, ils le sont en
vertu des dispositions du CESEDA, qui prévoit notamment que lorsque le
mineur non accompagné d’un représentant légal n’est pas autorisé à entrer
en France, le Procureur de la République, avisé immédiatement par
l’autorité administrative, lui désigne sans délai un administrateur ad
hoc.
La direction de la police aux frontières de l’aéroport de Roissy-Charles
de GAULLE veille scrupuleusement au respect de cette disposition, le juge
des libertés et de la détention sanctionnant les désignations et les
déplacements tardifs desdits administrateurs. En outre, à Roissy-Charles
de GAULLE, les mineurs de moins de 13 ans sont hébergés dans un quartier
qui leur est dédié, sous la surveillance spécifique de médiateurs de la
Croix-Rouge Française, sur la base d’une convention additive.

Objectifs chiffrés

99. Comme indiqué dans le cadre de sa visite des Zones d’attentes de
l’aéroport de Roissy et du CRA du Mesnil-Amelot, le Commissaire craint que
la pression engendrée par les objectifs chiffrés de reconduite à la
frontière pousse les force de l’ordre à procéder à de plus en plus
d’interpellations avec des méthodes parfois contestables. Plusieurs
associations ont fait état auprès du Commissaire d’un accroissement des
contrôles « au faciès » et du détournement de commissions rogatoires afin
de procéder à des contrôles d’identité sur une zone étendue. Quatre
citoyens français auraient ainsi été placés en rétention en 2007 avant
d’être ultérieurement libérés. Dans son avis sur la situation à Mayotte,
la CNDS dénonce la reconduite à la frontière de citoyens français vers les
Comores. Ces pratiques illégales sont heureusement exceptionnelles mais
démontrent l’impact que peut avoir une politique centrée sur la
réalisation de chiffres où le quantitatif prime parfois sur la nécessaire
obligation de respecter les droits des individus.

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