Communication du 5 novembre 2011 concernant la laïcité
devant le comité central de la LDH.
La question de la laïcité se pose de nouveau de
manière aiguë tant à cause des obstructions violentes apportées par des
intégristes catholiques aux représentations de la pièce de Castellucci au
théâtre de la Ville, obstructions portant gravement atteinte à la liberté
d’expression dans un Etat où le blasphème n’est pas un délit ; ou bien, sans
qu’on puisse désigner pour l’instant les coupables, quand l’incendie des locaux
de Charlie Hebdo nous rappelle la pièce de Dürenmatt « Bidermann et les
incendiaires » par laquelle l’auteur, se souvenant de l’incendie du
Reichstag, nous mettait en garde sur la gravité de ce mode criminel de mise en
tension dans une société en crise ; l’hebdomadaire satirique s’apprêtait à
publier un numéro intitulé Charia Hebdo dédié à la montée du parti religieux
Ennhada lors des élections tunisiennes, numéro rédigé comme si le prophète
lui-même était le rédacteur en chef, exprimant ainsi par la dérision la
profonde inquiétude que ces résultats électoraux soulèvent sur les deux rives
de la Méditerranée. Pour compléter le tableau de l’actualité en matière de
laïcité, les déclarations de Christine Boutin pour que l’enseignement du genre
soit retiré des programmes de l’enseignement secondaire pose le problème du
statut et de la scientificité des savoirs à l’école et de leur indépendance par
rapport à l’appareil d’État ; comme les déclarations d’Elizabeth Badinter,
quelles que soient les réactions qu’elles provoquent, interrogent sur
l’instrumentalisation de la laïcité par la droite traditionnelle et l’extrême
droite, en rupture avec une longue tradition ; comme la manière dont les
décisions du Conseil d’Etat du 19 juillet favorables au financement public des
lieux de culte ou installations périphériques au culte ont été perçues par
certains militants de la laïcité comme « l’ouverture de la boîte de
Pandore ». Tout ceci nous interpelle vivement mais de manière confuse et
pour trouver à cet ensemble disparate une explication et une cohérence, je
propose d’analyser :
1)
Le nouveau paysage
religieux et areligieux dans un monde social et politique en crise.
2)
Dans ce contexte, quelle
pertinence pour quelle laïcité ?
3)
Spécificités des
positions de la LDH dans ce domaine et raisons de cette spécificité.
Enfin, quelques propositions en forme de conclusion
provisoire.
1.
Le nouveau paysage religieux et areligieux dans un monde social et politique en crise.
1.1. Se dessine un nouveau paysage religieux et
areligieux majoritairement sécularisé où les sans-religion deviennent
progressivement majoritaires et le revendiquent, ce qui constitue un tournant.
Ce mouvement s’inscrit dans un contexte où la crise exaspère les tensions et
mine la capacité de tolérance, ce qui ouvre les portes au simplisme, à la
démagogie et au populisme.
1.2. Deux processus contraires simultanés et en
tension :
1.2.a. sécularisation accrue de la majorité croissante
des Français pour qui les religions, leurs fidèles et leurs valeurs deviennent
un sujet d’exaspération et dont la surexposition médiatique est jugée, non sans
raison parfois, anachronique.
Tout se passerait pour le mieux si tout
le monde commençait à accepter plus ou moins ce type de principe :
« La prétention de certaines religions à enfermer une fois pour toutes les
valeurs et les normes qui définissent la nature de l’humanité en un dogme
intangible qui prétend à l’universalité, est irrecevable. Reconnaître par
contre qu’un travail continu d’examen critique et de redéfinition des valeurs
dans un monde qui change est indispensable ; à partir des rythmes et des
temporalités propres à chaque individu et à chaque groupe, construire «
une concordance des temps » entre tous ceux qui vivent sur le
territoire de la République et constituent son « laos », est la
tâche de tous aujourd’hui et maintenant ».
À supposer que ce type de laïcité
généreuse qui paraît par ailleurs indispensable soit reçu, il s’en faut qu’on
puisse la faire partager, sachant d’autre part qu’on ne peut en faire pour
autant une doctrine d’État.
1.2.b. Simultanément, pour de petites minorités au
contraire, on constate un retour vers la religion ; parce qu’il s’inscrit
à contresens du mouvement général de sécularisation, ce mouvement contraire qui
fait que des jeunes dont les ancêtres ont été musulmans sont plus nombreux que
dans les générations précédentes à se convertir individuellement à l’Islam,
apparaît comme un problème ; de même les progrès des conversions évangélistes
au sein des populations dont les ancêtres sont venus d’Afrique subsaharienne.
1.2.c. Le phénomène paraît s’aggraver quand les
pratiques religieuses revendiquées ou affichées par les nouveaux convertis
risquent, comme le montre Leïla Babès dans son livre « Le voile
démystifié » paru aux éditions Bayard en 2004 et toujours d’actualité, de
les séparer et de les enfermer, ce qui n’est pas une vue de l’esprit en ce qui
concerne le foulard dit islamique. L’auteure souligne que sous prétexte de
religion, il s’agit en fait de cacher les femmes et donc d’empêcher la possible
expression du désir des hommes, ce qui est une question d’éducation et
d’éthique, et pas de religion. Même si d’autres justifications existent, cette
approche anthropologique ne peut être évacuée.
Il
existe là un dissenssus entre celles et ceux pour qui l’expression de
l’identité sexuelle et du désir est légitime dans la société si l’on veut
établir une complète égalité, alors que cette expression était réservée
autrefois aux seuls hommes hétérosexuels ; ce bouleversement des mœurs ne
concerne pas seulement les musulmans mais apparaît plus fortement quand l’islam
devient visible, puisqu’il est totalement opposé à l’ethos que les musulmans se
croient obligés d’observer en la matière. Face aux régressions toujours
possibles, les droits des femmes doivent être défendus et réaffirmés.
Par ailleurs, il est possible que ce
retour du religieux cache aussi un refus de la modernité et de ses contraintes
pour lesquelles le temps n’est plus celui du salut par la religion entre
création et jugement, mais celui de l’histoire de l’univers dans laquelle
s’inscrit l’histoire de l’humanité commune à tous. Ceci concerne toutes les
religions du salut. Ce qui rend un peu plus difficile la construction d’une
« concordance des temps ».
1.3. Une double montée des intolérances :
1.3.a. De la part d’abord d’une petite partie de ceux
qui appartiennent aux minorités religieuses, terme qui concerne aujourd’hui les
croyants ou pratiquants de toutes les religions ; c’est précisément parce
qu’ils n’entendent pas devenir ce qu’ils sont devenus dans les faits, des
minoritaires vis-à-vis du contexte général, que certains réagissent violemment,
comme si le refus du temps qui passe et le déni des réalités étaient devenus
pour eux des attitudes régulières ; ils ont tendance à exiger de faire
respecter intégralement les normes qui leur sont propres comme au temps ou dans
les lieux où les normes religieuses étaient normes d’État. Lutter au besoin par
la violence contre la liberté d’expression dès qu’elle s’en prend aux religions
même par l’humour et la dérision, leur paraît admissible sinon légitime, ce qui
mine gravement l’ordre public et la paix civile.
Cette violence est d’autant plus
insupportable dans une République qui depuis 1905 « garantit » le
libre exercice des cultes religieux en privé et en public et qui ne cesse depuis
lors d’agir en ce sens, comme le montrent les récentes décisions du Conseil
d’Etat.
1.3.b. Mais en face, et c’est beaucoup moins facile à
entendre pour nous à la LDH et dans le camp laïque en général, se manifeste une
intolérance croissante de la majorité des sans-religion que les expressions
publiques de la religion, jugées archaïques, incommodent.
Cette majorité verrait bien restreindre
l’expression publique des cultes garantie par la loi, loi qu’elle ignore en
grande partie ; dans ce contexte, cette nouvelle majorité de sans-religion,
relativement peu cultivée quant à l’histoire et aux enjeux de la laïcité,
pourrait être séduite par une vision simplifiée laïciste antireligieuse de la
laïcité. Non sans péril pour la démocratie.
Et Marine Le Pen par calcul politique et
pour ratisser large, tournant le dos à la minorité catholique intégriste
constitutive du FN depuis ses débuts, revendique elle aussi la laïcité dès lors
qu’elle stigmatise les musulmans.
1.4. Le cas particulier de l’Islam.
1.4.a. Proportion croissante de conversions à l’Islam
parmi celles et ceux dont les ancêtres étaient musulmans. Affichage,
visibilité, ressentis parfois à l’extérieur comme une provocation.
1.4.b. Comment à la fois éviter les simplifications
mais néanmoins faire le lien avec l’ailleurs ? A condition de ne pas
oublier la phrase de Vincent Geisser et Françoise Lorcerie dans leur
« Étude sur le 3°arrdt de Marseille, fondation G. Soros »,
« Être musulman est considéré comme une catégorie sociale et relève dans
ce contexte plus d’une étiquette que d’une catégorie religieuse ».
Sans tomber dans les analyses simplistes,
le rôle de conservateur de l’état social patriarcal et hiérarchique que
certains États du golfe et l’Iran parmi d’autres, entendent faire jouer à la
religion islamique est incontestable, comme le sont les moyens qu’ils déploient
pour atteindre ce but à l’intérieur ou à l’extérieur de leurs Etats au
détriment de toute démocratisation possible. Il existe d’autre part un
islamisme politique qui rêve d’imposer et de faire triompher partout l’Islam et
ses normes sociétales à n’importe quel prix.
Connaissant ces difficultés, lutter ici et ailleurs contre
les discriminations s’impose donc plus que jamais.
De plus il faut reconstruire une école
et des savoirs déliés des religions qui permettent à toutes et tous d’acquérir
et consolider la faculté de juger et, au besoin, de s’émanciper, seule solution
démocratique. La passion la plus utile contre les intégrismes est la volonté de
connaître, de comprendre, de savoir afin de penser et de juger. A nous de
susciter ou de ressusciter cette passion intellectuelle et politique.
2.
Dans ce contexte, quelle pertinence pour quelle laïcité ?
2.1. La tentation d’une laïcité simplifiée exclusive.
a) Le choc créé en 1989 à Creil par la
revendication par trois élèves de porter un foulard qui les identifie comme
musulmanes au sein du collège public où elles étaient scolarisées n’a pas
permis l’indispensable analyse de sang froid mais a déclenché des réflexes
seulement défensifs dont nous ne parvenons toujours pas à sortir.
b) On se contente volontiers maintenant
d’un roman républicain simplifié qui narre l’édification d’une République
imaginaire et ce grâce à la laïcité de 1789 à 1905, ce qui conduirait « naturellement »
à la société actuelle où la religion est devenue facultative.
Allant au-delà de la loi de 1905, il
faudrait poursuivre la lutte contre les religions en limitant et confinant leur
expression à l’espace privé.
Il faudrait défendre exclusivement
l’école publique laïque telle qu’elle est sans aucune remise en cause et lui
donner ou lui rendre un quasi monopole dans la transmission des savoirs.
c) Ce discours séduit à gauche, à droite
et à l’extrême droite puisque, au passage, il marginalise l’Islam et les
musulmans. Ce discours envahit les associations et les partis et risque de
devenir la doxa en matière de laïcité lors des prochaines campagnes
électorales.
Ce discours apparaît dangereusement consensuel
alors qu’il fait complètement l’impasse sur l’histoire réelle et la complexité,
la subtilité pour ne pas dire l’intelligence que suppose la laïcité et de ce
fait il asphyxie la démocratie.
2.2. Un paysage en ruines. Pour nous résumer :
2.2.a. Sécularisation croissante à tendance
antireligieuse.
2.2.b. Repli simultané des minorités musulmanes et
évangélistes en particulier vers des formes de religion intégrales et
intransigeantes qui aggravent leur marginalisation.
2.2.c. Intolérance accrue vis à vis de la libre
expression critique, humoristique à sujet religieux de la part des adeptes des
religions en général qui refusent de devenir ce qu’ils sont désormais, des
minorités.
2.2.d. Printemps arabes dont on redoute qu’ils soient
dévorés par l’islamisme, mais cette crainte ne trahit-elle pas, une nouvelle
fois une incapacité d’analyse et un grave manque de sang-froid ?
2.2.e. Face à ces périls aussi réels qu’insuffisamment
analysées, restauration d’une laïcité de combat de type communautarien
républicain antireligieux.
2.2.f. Et symétriquement, retour ou recours pour
résoudre l’évidente crise de l’école au monopole des savoirs et de leurs
transmissions par la République, à l’opposé exact des propositions
fondamentales de Condorcet dans les « Cinq mémoires sur l’instruction
publique ».
3. Spécificités des positions de la
LDH dans ce domaine et raisons de
cette spécificité.
3.1. Face à ces dérives inquiétantes, il est
nécessaire de restaurer un travail continu de laïcisation comme processus
d’agencement des individus et des groupes « même religieux » au sein
d’un laos qui puisse construire une démocratie inclusive (ou mieux une
« laocratie » ?) fondée sur le débat, sur le respect des droits,
sur la complexité des espaces, des places, des positions et des rôles, sachant
qu’il existe bien une opposition public/privé mais qu’elle ne peut se réduire à
la simple transposition géométrique espace privé/espace public. Et rappeler
avec insistance que la loi de 1905 achève et confirme la mise en place d’une
société civile esquissée en 1789, interrompue en 1791 par la loi Le Chapelier
et réintroduite à partir de 1880, indépendante de l’Etat et ouverte à toutes
les expressions « même religieuses ».
3.2. Cette société civile se déploie dans son espace
propre, l’agora, qui se distingue de l’espace public de l’Etat mais qu’on ne
saurait enfermer dans des limites géométriques sachant que selon les
circonstances et les rôles individuels le même espace peut devenir espace
public de l’Etat ou espace public de l’agora. Pour saisir cette complexité une
analyse fine de la topologie complexe pédagogique, administrative, juridique et
politique de l’espace scolaire public par exemple, serait indispensable.
L’espace privé se subdivise lui-même en espace privé des groupes ou des
familles et espace intime des individus. Seules la subtilité et le sens des
nuances peuvent rendre compte de la complexité de ces topologies juridiques,
sociales, civiles et politiques, complexité indispensable à la respiration
démocratique.
3.3. La laïcisation continue suppose aussi trois
séparations simultanées, dont la troisième est souvent occultée : si tout
le monde admet que la séparation de l’Eglise catholique et de l’Ecole publique
entre 1881 et 1886 déliant définitivement le croire et les savoirs, a précédé
et rendu possible la séparation des Eglises et de l’Etat en 1905 entre croire
et pouvoir, on ignore le plus souvent que l’instruction seule est obligatoire,
pas l’école ; Ferry et Buisson n’oublient pas les principes de
Condorcet : le partage du sensible et de l’intelligible, l’accès à la
faculté de juger grâce à l’école sont des moyens pour chaque individu d’accéder
à sa propre humanité de manière consciente, de s’émanciper s’il l’estime
nécessaire des appartenances héritées et de pouvoir exercer avec ses
concitoyens sa part de souveraineté politique. L’école publique laïque est une
proposition avantageuse pour les parents par son caractère gratuit, non une
obligation ni un monopole.
L’Etat doit être rigoureusement séparé
des savoirs, la vérité ne lui appartient pas, si l’on veut éviter de sa part
toute dérive tendant à l’endoctrinement. Les savoirs et le pouvoir ne peuvent
être dans le même camp sans mettre gravement en péril la démocratie. Il s’agit
de fonder la liberté et l’égalité sur le partage des savoirs pour émanciper,
même de l’Etat si nécessaire. Condorcet, mathématicien secrétaire de l’Académie
des sciences, rêvait d’une complète indépendance des savoirs comme instrument
de l’égalité et garant de la liberté et du progrès. En conséquence une
doctrine, une idéologie d’Etat, une morale laïque générale, une valeur commune
subsumant toutes les autres et s’imposant à tous s’ils veulent faire partis de
la République, sont irrecevables et à proscrire en démocratie, contrairement à
la tradition laïque du communautarisme républicain.
3.4. Les raisons de notre combat :
a) La liberté religieuse n’est pas
l’objectif, mais un des aspects, aujourd’hui mineur, de la liberté de
conscience et de l’autonomie de chacun. L’objectif est de permettre
l’acceptation et l’accueil inconditionnel des autres et de nous-mêmes dans la
pluralité des individus et des groupes qui devient un principe, l’unité n’étant
pas un préalable mais la perspective lointaine.
Il faut toujours rappeler à ce sujet
qu’en France le pluralisme religieux est la matrice du pluralisme politique
depuis les guerres de Religion et il faut prendre en considération
l’acharnement que mettent Briand, Jaurès et Clémenceau à maintenir la
continuité du service pluriel des cultes après 1905, quand l’Eglise catholique
ne parvient pas, quoi qu’elle fasse, à se mettre hors-la-loi, grâce à
l’exceptionnelle intelligence politique et à la souplesse ingénieuse de ce
gouvernement Rouvier. En parfait protecteur de la démocratie, le conseil d’Etat
aujourd’hui comme hier a toujours interprété très libéralement une loi libérale
à l’origine comme le soulignait en 2005 Patrice Rolland.
b) Ensuite le passage obligé est celui
de la reconnaissance au sens hégélien de la singularité des individus et des
groupes à la suite de leur accueil et de leur acceptation, sachant que
reconnaissance ne signifie pas approbation inconditionnelle des valeurs
nouvelles, mais leur prise en considération. L’étape suivante est celle de la
coopération : toutes et tous, dès lors qu’ils résident sur le territoire
de la République sont appelés à coopérer et partagent, de fait, une part de
citoyenneté.
c) Les valeurs communes sont restreintes
et suffisent à l’élaboration de la loi et du droit ; elles ne
disqualifient pas les valeurs particulières mais les déplacent hors de l’universalité ;
ces valeurs communes comprennent des éléments fondamentaux faute desquels une
société risque la déshumanisation, mais au cours du temps certains éléments
s’effacent et disparaissent : sans être infidèle à son passé l’espèce
humaine ne cesse de projeter et de redéfinir son humanité.
Quelques
propositions en manière de conclusion provisoire :
1° En bonne laïcité, il n’existe pas d’essence ou de
substance du religieux qui donnerait aux religions un pouvoir ou une puissance
qui leur soit propre, mais seuls existent des hommes et des femmes qui
subissent les religions ou qui s’en saisissent, parfois à des fins identitaires
ou politiques. Symétriquement il n’existe évidemment pas de substance de la
laïcité.
2° Il faut accepter et tenir compte du fait que
certains êtres humains définissent leur humanité à travers leur religion ;
au pays de Pascal, d’Emmanuel Lévinas de Paul Ricœur parmi beaucoup d’autres,
ignorer cette dimension de l’humanisme religieux serait faire preuve
d’aveuglement, de partialité ou de méconnaissance ; d’autant que E. Durkheim,
Lévy-Bruhl, M. Mauss, Griaule, G.Tillon, C. Lévi-Strauss et G.Balandier parmi
beaucoup d’autres n’ont cessé d’enrichir l’anthropologie française par
l’étude des traditions, religieuses entre autres. Mais d’autres êtres
humains au contraire sont incommodés par le seul mot de religion ; et la
majorité est devenue aujourd’hui indifférente à ces querelles ; néanmoins
tous ont à vivre ensemble et à coopérer.
3° L’agencement des individus et des groupes dans l’unité
du laos, le peuple indistinct, visé par le travail continu de laïcisation, doit
laisser un peu de jeu, laisser des interstices, ne pas tout régler
minutieusement, pour que l’ensemble puisse rester souple et dynamique.
4° Le travail continu de laïcisation permet de passer
de l’unité donnée par la foi en une révélation religieuse supposée communément
acceptée à une unité construite par la loi élaborée et acceptée par tous dans
leur pluralité. Cette laïcisation suppose la patience, le labeur, beaucoup de discernement
et de subtilité. La créativité commune et l’espérance qu’elles engendrent sont
à ce prix.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire